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Le Droit de l'Entreprise

DROIT DU TRAVAIL
La prise en charge par l'AGS des créances salariales des salariés licenciés dans le cadre d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire
Publié le 02/04/1999
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Les salariés licenciés dans le cadre d'une procédure collective bénéficient d'une garantie contre le risque de non paiement des sommes qui leur sont dues par leur employeur.

Les articles L. 143-11 et suivants du Code du travail prévoient, en effet, un régime d'assurance mis en oeuvre par l'Association pour la gestion du régime d'assurance des créances des salariés (A.G.S.), financée par les cotisations des employeurs. Cette garantie concerne les créances de nature salariale visées par L. 143-11-1 du Code du travail, à savoir les créances nées antérieurement à l'ouverture de la procédure collective ainsi que les créances nées de la rupture du contrat de travail intervenue pendant la période d'observation ou postérieurement au prononcé du jugement de liquidation judiciaire.

Lorsqu'elle a été créée, le 27 décembre 1973, la garantie ne prévoyait aucun plafonnement. La loi n° 75-1251 du 27 décembre 1975 est venu modifier le Code du travail, pour instaurer une limite correspondant "à un ou des montants fixés par décret, en référence au plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions du régime d'assurance chômage..." (article L. 143-11-8 du Code du travail), laquelle limite devait s'appliquer à "toutes créances du salarié confondues". Ces limites ont été fixées, par décret, à treize fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance chômage lorsque les créances résultent des dispositions législatives ou réglementaires ou de stipulations d'une convention collective et sont nées d'un contrat de travail dont la date de conclusion est antérieure de plus de six mois à la décision prononçant le redressement judiciaire (article D. 143-2 du Code du travail). Dans les autres cas la garantie est limitée à quatre fois le plafond ainsi défini.

Compte tenu de l'ambiguïté de ces dispositions, la Cour de cassation a été amenée a les interpréter, pour considérer, dans un premier temps, que lorsque les parties avaient librement débattu le montant des rémunérations, cette circonstances était exclusive de l'application du plafond treize (Par ex. Soc., 20 janvier 1993, Bull. V, n° 15). Cette jurisprudence conduisait à l'application du plafond quatre à la quasi-totalité des salariés dont le montant de la rémunération excédait, ne serait-ce que de quelques francs, le montant de la rémunération correspondant au coefficient hiérarchique déterminé par la Convention Collective applicable ainsi qu'à tous les salariés dont l'employeur n'était lié par aucune convention collective.

Or, l'arrêt ci-dessous reproduit constitue un revirement très important, dès lors la Cour de cassation estime désormais qu'il importe peu que le montant des créances ne soit pas fixé par la loi, un règlement ou une convention collective. Il s'agit simplement de savoir si les créances trouvent leur fondement dans une loi, un règlement ou une convention collective.

Arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale, du 15 décembre 1998

La Cour, en l'audience publique du 27 octobre 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, Président, M. Frouin, Conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Carmet, Merlin, Boubli, Favard, Brissier, Gougé, Ollier, Finance, Chagny, conseillers, M. Boinot, Mme Girard, MM. Richard de la Tour, Liffran, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Frouin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS de Paris et de l'UNEDIC Gestionnaire de l'AGS, de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de M. Boue, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu que M. Boue, entré au service de la société Mole Richardson le 15 avril 1984, a été licencié pour motif économique le 29 juillet 1994, avec dispense d'exécution d'un préavis de six mois ; que la société Mole Richardson avait été déclarée en liquidation judiciaire le 22 juillet 1994 ; que le compte de M. Boue ayant été arrêté à la somme de 443.555,28 Francs, le salarié a perçu de l'ASSEDIC à titre d'avances la somme de 205.439,00 Francs correspondant à quatre fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance-chômage ; que M. Boue a fait assigner la M. Sudre, ès-qualités de mandataire liquidateur de la société Mole Richardson, et l'AGS, à l'effet d'obtenir qu'il soit décidé que l'AGS était tenue de le garantir de ses créances dans la limite du plafond 13 et que soit ordonné en conséquence le paiement d'une somme représentant le solde de sa créance ;

Attendu que l'AGS fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que sa garantie devait s'appliquer dans la limite du plafond 13 et d'avoir ordonné le versement au salarié de la somme réclamée, alors, selon le moyen, que sont garantie par l'AGS dans la limite du plafond 4 les créances ayant pour base de calcul la rémunération du salarié dont les modalités et le montant ont été librement débattus entre les parties et dans la limite du plafond 13 les sommes qui résultent d'un salaire minimum impérativement fixé par la loi, le règlement et la convention collective et qui sont nées d'un contrat de travail dont la date de conclusion est antérieure de plus de six mois à la décision prononçant le redressement, qu'en appliquant le plafond 13 parce qu'il constituerait le droit commun, le plafond 4 n'étant que l'exception et que la créance avait été calculée en fonction des règles prévues par la loi, le règlement ou la convention collective, peu important que son montant n'ait pas été fixé par l'une de ces sources du droit, la Cour d'Appel qui a refusé d'appliquer le plafond 4 à des créances résultant d'un salaire librement débattu a violé les articles L. 143-11-8 et D. 143-2 du Code du travail ; et alors que les créances super privilégiées de salaires l'emportent sur toutes les autres même postérieures au jugement d'ouverture et relevant comme telles de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, que la Cour d'Appel a constaté que M. Boue avait été licencié après le prononcé de la liquidation judiciaire, qu'en énonçant que la perception par l'AGS de divers remboursements au titre de sa créance super privilégiée avait été faite en méconnaissance de son rôle subsidiaire et avait artificiellement diminué le niveau de couverture auquel elle était tenue au détriment du règlement de l'indemnité conventionnelle de licenciement de M. Boue, pour en déduire que le solde de la créance de ce dernier était en toute hypothèse inférieur au plafond 4, la Cour d'Appel a violé les articles L. 143-11-9 du Code du travail et 40 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu qu'aux termes de l'article D. 143-2, alinéa 1er, du Code du travail, le montant maximum de la garantie prévue à l'article L. 143-11-8 du même Code est fixé à treize fois le plafond mensuel retenu pour le calcul des contributions au régime d'assurance-chômage lorsque les créances résultant de dispositions législatives ou réglementaires ou des stipulations d'une convention collective et sont nées d'un contrat de travail dont la date de conclusion est antérieure de plus de six mois à la décision prononçant le redressement judiciaire ;

Que les créances résultant de dispositions législatives ou réglementaires ou conventionnelles au sens de ce texte sont celles qui trouvent leur fondement dans une loi, un règlement ou même une convention collective, peu important que le montant ne soit pas lui-même fixé par l'une de ces sources de droit ; que la rémunération du salarié, contrepartie de son travail, entre les prévisions de l'article D. 143-2, alinéa 1er du Code du travail, même lorsque son montant est fixé par l'accord des parties ;

D'où il suit que c'est à bon droit que la Cour d'Appel a décidé que la créance du salarié, constituée des indemnités conventionnelles de rupture et d'un solde de rémunération, était garantie dans la limite du plafond 13 ;

Que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi

Condamne l'AGS de Paris et l'UNEDIC Gestionnaire de l'AGS aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. BOUE ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre Sociale, et prononcé par le Président en son audience publique du quinze décembre mil neuf cent quatre vingt dix huit.

Pascal ALIX
Avocat à la Cour



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