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Le Droit de l'Entreprise

DROIT DE L'INTERNET
Le téléchargement gratuit et légal vu par Beezik
Publié le 21/05/2010
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Le site musical Beezik s'est développé en s'appuyant sur le concept - remarqué car considéré comme pratiquement impossible - du « téléchargement gratuit et légal », dès lors que le téléchargement devait être « financé par la publicité ». Qu'en est il exactement ?

Un site de téléchargement légal financé par la publicité

Le concept, présenté comme innovant par Beezik, est le suivant : pour télécharger un morceau, il est nécessaire de regarder un spot publicitaire de 10 à 15 secondes. Au lieu d'être programmées par l'exploitant du site, la régie publicitaire ou de s'afficher de manière aléatoire, les publicités sont choisies par l'utilisateur parmi quatre spots différents. Une fois le spot de publicité terminé, l'utilisateur dispose de quelques secondes pour confirmer en un clic qu'il a bien vu la vidéo et que le téléchargement peut démarrer. La marque d'un sponsor apparaît ensuite sur la pochette du titre téléchargé.

et octroyant des bons de réduction aux utilisateurs

En plus de pouvoir télécharger des titres gratuitement et en toute légalité, les utilisateurs reçoivent des bons de réduction utilisables auprès d'une cinquantaine de sites de e commerce partenaires. Parmi eux se trouvent des grandes enseignes telles que les 3 Suisses, Pixmania, Rueducommerce, Sephora etc.

Concrètement, pour chaque téléchargement, l'utilisateur cumule 30 points équivalents à 30 centimes d'euro. Ces points peuvent ensuite être transformés à tout moment en bons de réduction virtuels via le site beezik.com, à hauteur de 4 à 25% du prix total.

Un véritable « téléchargement légal et gratuit » ?

Beezik nous promet le « téléchargement légal et gratuit » d'un morceau.

Pour certains des titres, dépourvus de DRM, la promesse est tenue. Pour les autres (la moitié des titres), ce n'est pas tout à fait le cas.

Les limites du système : la présence de DRM

Les morceaux téléchargés sont en fait des fichiers au format WMA de Microsoft accompagnés de verrous numériques (DRM) limitant leur copie ainsi que la durée d'écoute (un mois en l'absence de renouvellement de la licence).

En pratique, chaque titre peut être transféré cinq fois sur un PC, un ordinateur portable ou un baladeur compatible, mais ne peut pas être gravé sur CD ou transféré sur un lecteur non compatible. Il faut aussi être équipé de Windows Media Player pour lire les fichiers et obtenir une licence valable un mois et renouvelée à chaque connexion sur le site Beezik, faute de quoi le fichier téléchargé ne peut plus être lu.

Dans les conditions générales d'utilisation, Beezik mentionne l'existence d'une licence à renouveler tous les mois. En cas de non-renouvellement, l'internaute est dans l'impossibilité d'écouter le morceau téléchargé. De sorte que l'utilisateur de Beezic n'est, en ce cas, bénéficiaire que d'une licence temporaire de courte durée.

Bref, un système assez contraignant et assez peu approprié au téléchargement sur des dispositifs mobiles proche de celui mis en place par Neuf/SFR au profit de ses abonnés, dans la mesure où la plupart de ces dispositifs ne permettent pas de lire les fichiers WMA avec DRM (certains lecteurs des marques Créative et Phillips le peuvent par exemple).

L'utilisateur voulant avoir la possibilité d'écouter le morceau sur le support qu'il souhaite (lecteurs MP3/WMA, iPod, téléphones mobiles, etc.) a pour unique choix de recourir à des méthodes de « contournement de DRM ».

Le contournement de DRM est-il légal ?

En 2006, la loi DADVSI[1] est venue interdire en France le contournement des mesures de protection technique (DRM). Le contournement de DRM est désormais une infraction passible de 3 ans d'emprisonnement et de 300.000 euros d'amende.

Mais la portée pratique de cette disposition semble bien incertaine.

Le Parquet du TGI de Paris[2] a eu à connaître d'une affaire relative à un groupe de personnes, membres du collectif StopDRM, venu se dénoncer dans un commissariat pour avoir contourné des DRM. Ils souhaitaient par cette action démontrer l'inapplicabilité de la loi DADVSI. Finalement, le Parquet a classé l'affaire sans suite en raison du comportement "irresponsable" des personnes qui avaient brisés les DRM. Certes, cette décision n'a qu'une portée très limitée sur le plan juridique. Mais elle est assez révélatrice de l'embarras de la Justice dans ce type d'affaires.

Parallèlement, le Conseil d'État, saisi dans le cadre d'une requête en annulation contre un décret relatif à la répression pénale (des atteintes définies par la loi DADVSI), a rendu une décision[3] où il donne sa position sur les DRM. En réaffirmant l'exception de décompilation, le Conseil d'État rétablit l'exception de contournement des DRM à des fins d'interopérabilité. Il consacre, d'une certaine manière, le droit de créer et d'utiliser un logiciel libre pour lire des contenus protégés par DRM.

La portée de cette dernière décision doit cependant, en pratique, être appréciée en tenant compte des stipulations contractuelles (conditions générales) applicables aux licences d'utilisation en vigueur lors du téléchargement.

Avec la collaboration de Celia Arrighi



[1] Loi n°2006-961 du 1er Août 2006

[2] http://linuxfr.org/2007/01/12/21891.html

[3] Section du contentieux, 10ème et 9ème sous-sections réunies, le 16 Juillet 2008, n° 301843

Pascal ALIX
Avocat à la Cour



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