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Le Droit de l'Entreprise

DROIT DU TRAVAIL
Le secret des correspondances électroniques privées envoyées et reçues sur le lieu de travail
Publié le 01/10/2001
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Par un arrêt rendu le 2 octobre 2001 (arrêt NIKON FRANCE c/ ONOF, pourvoi n° 99-42.942), la Cour de Cassation a rappelé, au visa de l'article 8 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales, de l'article 9 du Code civil et de l'article 120-2 du Code du travail, que "le salarié a droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l'intimité de sa vie privée ; que celle-ci implique en particulier le secret des correspondances; que l'employeur ne peut, dès lors sans violation de cette liberté fondamentale, prendre connaissance des messages personnels émis par le salarié et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à sa disposition pour son travail et ceci même au cas où l'employeur aurait interdit une utilisation non-professionnelle de l'ordinateur".

Par cette décision, la Cour de Cassation réaffirme un principe déjà bien établi, à savoir celui selon lequel même sur le lieu de travail le salarié dispose d'un droit au respect de l'intimité de sa vie privée. Droit qui s'oppose, par exemple, à ce que l'employeur contrôle les correspondances électroniques de ses salariés à son insu, dans la mesure où, ainsi que le rappelle la CNIL, le lien de subordination qui caractérise le contrat de travail ne permet pas d'ignorer le respect à la vie privée dont doit jouir le salarié notamment lorsqu'il utilise la messagerie électronique sur son lieu de travail (rapport de la CNIL, mars 2001).

Par ailleurs, le Tribunal Correctionnel de PARIS avait décidé, le 2 novembre 2000, que le courrier électronique devait être qualifié, juridiquement, de "correspondance privée" de sorte qu'il devait être soumis, sur le plan pénal, au régime de la confidentialité des correspondances.

En d'autres termes, l'arrêt qui a été rendu par la Cour de Cassation le 2 octobre 2001 est conforme aux règles de droit européennes et françaises, telles qu'interprétées antérieurement par les autorités administratives indépendantes et les juridictions saisies.

Le caractère novateur de la décision provient de ce que la Cour de Cassation a affirmé, sans l'ombre d'une hésitation, que l'interdiction d'utiliser un matériel professionnel à des fins personnelles n'est pas de nature à écarter la règle du secret des correspondances qui constitue, comme le rappelle la Cour de Cassation, une "liberté fondamentale". De sorte que l'employeur ne peut, même lorsque l'utilisation personnelle du matériel informatique a été interdite contractuellement, "prendre connaissance" de la correspondance électronique d'un salarié même s'il souhaite se ménager une preuve de l'utilisation personnelle du matériel.

Mais que l'on ne se méprenne pas : la Cour de Cassation n'a nullement reconnu le droit, pour chaque salarié, d'utiliser les matériels et les logiciels mis par les employeurs à leur disposition à des fins personnelles, notamment pour accomplir des actes de concurrence, comme c'était le cas en l'espèce.

L'utilisation personnelle - au-delà d'une certaine tolérance appréciée souverainement par les juridictions du fond - du matériel professionnel mis à la disposition d'un salarié pour qu'il accomplisse la mission qui lui a été confiée et en contrepartie de laquelle il perçoit une rémunération continue de constituer, même après l'arrêt commenté, au manquement au devoir de loyauté qui s'impose au salarié. Ce devoir de loyauté lui interdit, notamment, de se consacrer à une autre activité professionnelle (concurrente ou non) pendant son temps de travail.

La Cour de Cassation a censuré la décision rendue par la Cour d'Appel de PARIS qui avait accueilli les demandes de l'employeur. Celui-ci invoquait l'existence d'une faute grave résultant de l'utilisation personnelle (activité professionnelle concurrente) du matériel informatique.

Mais la juridiction suprême a insisté essentiellement sur l'illicéité de la méthode utilisée par l'employeur pour prendre connaissance des faits litigieux.

Il s'agit certes d'une décision favorable aux salariés en ce qu'elle affirme clairement que, pour vérifier le contenu des messages électroniques envoyés et reçus par un salarié, l'employeur doit demander son accord et ne jamais le faire à son insu.

Mais la Cour de Cassation n'a aucunement affirmé, de manière générale, un droit qui serait celui de se constituer un "vestiaire virtuel" auquel l'employeur ne pourrait avoir accès.

Certes, si le salarié s'oppose à ce que les messages soient ouverts par son employeur, même en sa présence, une véritable difficulté se ferait jour.

La décision ne remet pas en cause, toutefois, le droit, pour les employeurs, de contrôler l'activité des salariés. Elle rend plus délicate, en revanche, les modalités d'application de ce droit.

Tant le contenu des chartes d'utilisation de la messagerie électronique de l'entrerise que les fonctionnalités des logiciels contrôlant les messages envoyés et reçus par les salariés doivent désormais être soigneusement examinés.

Article publié sur RHinfo

Pascal ALIX
Avocat à la Cour



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