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Le Droit de l'Entreprise

DROIT DU TRAVAIL
Les avantages et les risques du portage
Publié le 02/02/2005
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Une pratique avantageuse pour toutes les parties

Pour le porté, le portage présente des avantages indéniables par rapport à la création d'une entreprise, souvent coûteuse et inadaptée lorsqu'il s'agit de répondre à une mission unique d'une durée limitée. Il offre la possibilité de travailler avec une grande autonomie et permet d'alterner des périodes de travail et des périodes d'inactivité, avec une protection juridique et financière (périodes intercontrats). De sorte que cette pratique est particulièrement adaptée pour les jeunes professionnels et pour les travailleurs de plus de 50 ans.

Par ailleurs, le portage a pour avantage de dispenser le porté des formalités administratives et comptables liées à l'activité non salariée. Le porté bénéficie en outre de l'assurance responsabilité civile professionnelle de la société de portage (qui constitue souvent un poste non négligeable pour les entreprises nouvellement créées). De plus, la rémunération obtenue ainsi par les portés est généralement supérieure à la rémunération perçue pour fournir une prestation équivalente dans le cadre d'un contrat de travail.

Pour l'entreprise cliente, les avantages sont évidents, puisque celle-ci peut bénéficier de compétences spécialisées pour des missions ponctuelles, hors de la réglementation particulièrement rigide des CDD d'usage ou pour accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, moyennant un coût inférieur à celui proposé par les sociétés prestataires offrant le même service.

Une pratique qui demeure juridiquement risquée

1. - Les risques pour le client

Le droit du travail comprend, rappelons-le, de nombreuses règles dites "d'ordre public", c'est à dire des règles auxquelles il est impossible de déroger par contrat. Parmi ces règles impératives figure la désignation de l'employeur. A cet égard, le droit du travail est pragmatique, à savoir qu'il tient autant compte de la réalité des relations entre les parties que des stipulations des contrats.

Or, l'existence d'un contrat de travail découle non pas du choix fait par les parties mais de la réalité du (ou des) lien(s) de subordination.

Il en résulte notamment que l'entreprise cliente, si elle est amenée à donner des consignes ou des directives à l'intervenant ou à l'intégrer d'une manière ou d'une autre dans ses services (tel est le cas notamment lorsque le porté travaille dans les murs de l'entreprise cliente), pourrait être déclarée coemployeur par la juridiction prud'homale qui pourrait être saisie par un intervenant, notamment en cas de rupture des relations.

La remise en cause de la nature de la relation de travail par une juridiction prud'homale pourrait notamment conduire à une requalification de la relation de travail en CDI entre l'entreprise cliente et le porté, notamment en raison du non-respect du formalisme obligatoire des contrats à durée déterminée ou de mission. Ce qui peut notamment avoir pour conséquence de requalifier un non-renouvellement de contrat de prestations de services en un licenciement sans cause réelle et sérieuse...

L'article L. 125-2 du Code du travail prévoit que lorsqu'une entreprise "passe un contrat pour l'exécution d'un certain travail ou la fourniture de certains services, avec un entrepreneur qui recrute lui-même la main d'oeuvre nécessaire et que cet entrepreneur n'est pas propriétaire d'un fonds de commerce ou d'un fonds artisanal, le chef d'entreprise encourt [diverses responsabilités, dont la substitution de l'entreprise défaillante dans le paiement des salaires et cotisations]". Toute la question est donc, sur ce point, de savoir si la société de portage fournit un service autre que celui de mettre de la main d'oeuvre à disposition de l'entreprise cliente. Or, il est parfois possible de faire valoir que ces sociétés fournissent un réel service d'"ingénierie sociale".

Pour écarter ou, à tout le moins, limiter ces risques, il convient non seulement de rédiger des contrats avec un soin tout particulier, avec l'appui d'un juriste connaissant parfaitement ces questions, mais également de prévoir une organisation qui ne laisse aucun doute sur l'autonomie du porté par rapport à l'entreprise cliente, de manière à exclure tout lien de subordination.

2. - Les risques pour la société de portage

Le principal risque juridique encouru par la société de portage est la caractérisation du délit de marchandage.

L'article L. 125-1 du Code du travail précise en effet que le marchandage est constitué par "toute opération à but lucratif de fourniture de main d'oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ou d'éluder l'application des dispositions de la loi, de règlement ou de convention ou accord collectif de travail". Or, il faut le reconnaître, le portage peut constituer une méthode pour se situer hors du cadre légal du droit du travail dans les relations entre le porté et l'entreprise cliente, quand bien même cette législation est souvent inadaptée car elle ne prévoit pas l'hypothèse dans laquelle c'est l'intervenant lui-même qui est à l'origine de l'opération.

La définition et la mise en oeuvre de l'opération de portage doit donner lieu à une analyse particulièrement rigoureuse, afin de déterminer, avant de conclure les contrats, si le schéma imaginé n'entre pas dans le champ d'application de L'article L. 125-1 du Code du travail, dont l'application conduit, il faut le rappeler, à une peine d'emprisonnement de deux années et/ou au paiement d'une amende de 30 000 à 150 000 euros.

L'article L. 125-3 du Code du travail prohibe, en outre, le "prêt de main d'oeuvre à but lucratif", à savoir la convention ayant pour seul objet la fourniture de main d'oeuvre moyennant une rémunération.

Ces délits ne pourront cependant être constitués que si le contrat de portage ne présente pas les caractères d'un contrat d'entreprise (fourniture de services et non simplement de main d'oeuvre).

La jurisprudence retient notamment la qualification de délit de marchandage dans les cas où l'entreprise cliente fournit les moyens à l'intervenant (matériel professionnel, véhicule, etc.), lorsqu'elle le contraint à un horaire ou à des conditions précises de travail ou, de manière générale, lorsqu'elle contrôle directement l'activité du porté (et non seulement les résultats de cette activité) et lui donne des instructions.

La société de portage doit également veiller à ce que l'opération ne porte aucun préjudice au salarié. Pour cela, il convient d'examiner avec soin le statut collectif dont aurait bénéficié le porté en qualité de salarié de l'entreprise cliente, pour le comparer au statut qui résulte du contrat conclu avec la société de portage. Cependant, cette comparaison peut être délicate car la perte de certains avantages ou garanties peut être compensée par une rémunération plus élevée.

Pascal ALIX
Avocat à la Cour



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